Libération des détenus d’opinion et respect des libertés citoyennes

Comment commencer l’année à l’heure des vœux sans rappeler que des détenus d’opinions croupissent, « arbitrairement » comme l’écrit Amnesty International Algérie, dans les geôles algériennes depuis des mois et parfois des années ?

Amnesty International demande en particulier la libération du journaliste Ihsane El Kadi. Emprisonné depuis plus d’une année, il a été condamné, à sept ans de prison dont cinq ans ferme, « sur la base d’accusations infondées liées au fait d’avoir perçu des financements dans le but de se livrer à de la « propagande politique » et de porter « atteinte à la sécurité de l’État ». Amnesty International appelle à « la libération du journaliste Ihsane El Kadi et toutes les personnes détenues arbitrairement ». Rappelons aussi que Kamira Nait Sid est en prison depuis août 2021, qu’elle a été condamnée, le 4 juillet 2023 par la Cour d’Appel d’Alger, à trois ans de prison ferme pour « terrorisme » version article 87 bis. Kamira Nait Sid était la coprésidente du Congrès mondial amazigh, une ONG de défense des droits des peuples amazighs. Sa libération est une exigence de justice. Le 17 juin 2023 le site kabyle.com livrait une liste non exhaustive des détenus d’opinion kabyles.

Le 29 juin 2023, la sénatrice Les Républicains des Bouches-du-Rhône, Mme Valérie Boyer(1) à poser une question écrite au gouvernement français à propos des « atteintes aux droits de l’homme en Algérie notamment envers les Kabyles » : « depuis 2021 et une réforme du code pénal algérien, notamment l’article 87-bis, ce pays a adopté une définition très large du terrorisme. Dès lors, ils assimilent désormais à du « terrorisme » ou à du « sabotage » tout appel à « changer le système de gouvernance par des moyens non constitutionnels ». (…) Avec cette réforme, selon les associations kabyles, plus de 500 Kabyles, poètes, écrivains, journalistes, militant associatifs, ont été emprisonnés et accusés « faussement » de terrorisme. Amnesty international et les autorités américaines ont d’ailleurs condamné cette redéfinition du terrorisme ». Elle rappelle « que le 9 février 2022, près de 340 détenus d’opinion étaient enfermés arbitrairement en Algérie. Que régulièrement, des Franco-Kabyles responsables d’associations et militants pour la culture kabyle ont été retenus dans les aéroports algériens. Que des milliers de familles kabyles ne peuvent plus revenir pour retrouver leur proche ». Mme Boyer « souhaite dénoncer la répression que subissent les militants pacifiques en Kabylie de la part du pouvoir algérien. De nombreux jeunes kabyles sont détenus dans les prisons algériennes, certains pour avoir participé à des rassemblements pacifiques, d’autres pour leurs écrits sur les réseaux sociaux ou encore pour port de drapeau kabyle ou amazigh. » Enfin, la sénatrice dénonce « les atteintes à la liberté de la communauté chrétienne en Algérie, qui se traduisaient par la fermeture d’une trentaine de communautés religieuses protestantes(2) ». Ce à quoi, le Ministère de l’Europe et des affaires étrangères a répondu que « la France entretient un dialogue régulier et étroit avec les autorités algériennes à tous les niveaux, à Paris comme à Alger, ou au sein des instances multilatérales. Elle aborde, dans ce cadre, le respect des libertés fondamentales et la situation des minorités religieuses, dans le respect de la souveraineté de l’Algérie(3) ».

Il ne reste donc qu’à continuer à dire et dénoncer l’arbitraire en Algérie ; et ailleurs. Et, avec notamment les éditions Koukou dirigées par Areski Aït Larbi souhaitez pour 2024 « la libération des détenus d’opinion, le respect des libertés citoyennes et une justice équitable ».

(1) Valérie Boyer est la sénatrice qui, dans le cadre de la discussion sur la Loi sur immigration, a déposé l’amendement – qui figurait au programme du Rassemblement national à l’élection présidentielle de 2017 – supprimant l’automaticité de l’accès à la nationalité française pour les mineurs nés en France de parents étrangers. Retour donc à la Loi Pasqua de 1993 : désormais, le mineur né en France de parents étrangers doit, pour acquérir la nationalité française, en manifester la volonté « à partir de l’âge de seize ans et jusqu’à l’âge de dix-huit ans ». En 1993, cette « manifestation de volonté » bénéficiait d’une fenêtre administrative de cinq ans (entre 16 et 21 ans), elle est ici ramenée à deux ans (entre 16 et 18 ans).

(2) Publiée dans le JO Sénat du 29/06/2023 – page 4002.

(3) Publiée dans le JO Sénat du 24/08/2023 – page 5050.