Langue kabyle

2019.12.21 (21)
Nacima Abbane

Nacima Abbane
Professeure de tamaziɣt depuis 15 ans, Nacima enseigne à l’ACB depuis 15 ans. Elle est responsable du cours pour enfants, rendez-vous hebdomadaire, pédagogique et chaleureux. Elle est l’auteure de Mon Abécédaire amazigh, avec Florence Mestais pour les illustrations, paru en 2021 (disponible à l’ACB).

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Karim Kherbouche

Karim Kherbouche 
Professeur à l’Éducation nationale et écrivain, Karim enseigne la langue berbère depuis une vingtaine d’années. Il est l’auteur d’un guide de la communication en français (Odyssée, 2010), d’un recueil de nouvelles La trahison d’une proie (Publibook, 2010), de Azmam n tira n tmaziɣt (Cahier d’écriture du berbère), manuel d’écriture pour enfants (Tira, 2013) et de Akken i sent-yehwa i tullas (Au bon vouloir des femmes), un roman en langue berbère (Tira, 2015).
En 2023 il fait paraitre un nouveau livre Apprendre à parler kabyle en jouant, un guide pratique de 134 pages (disponible à l’ACB).

« Wa yḥeffeḍ ɣef wa » - « Chacun apprend chez l'autre »

Depuis 1979, l’Association de culture berbère dispense des enseignements en langue kabyle, s’efforce, ce faisant d’apporter sa contribution à son développement et à sa promotion, de participer à la construction d’un universel en partage ou chacune et chacun apprend de l’autre.
La langue berbère, dans ses différentes déclinaisons, est l’une des langues les plus usitées au sein des populations françaises originaires principalement d’Algérie et du Maroc.

Elle serait même la deuxième langue parlée en France après la langue française. Ceci est le résultat d’une enquête famille du recensement de 1999 effectuée par le « Comité consultatif pour la promotion des langues régionales et de la pluralité linguistique interne ». Dans son rapport paru en décembre 2013, le comité précise que la langue berbère dans ses différentes variantes serait parlée par 1,5 à 2 millions de locuteurs en France – dont 1 million de Kabyles, 500 000 Chleuhs et 300 000 Rifains.

Derrière, arrivent la langue arabe dans ses différentes déclinaisons (950 000 à 1,2 millions de locuteurs, l’arménien occidental (180.000), le romani, (200.000), le yiddish (100.000) ou le judéo-espagnol (quelques milliers).
L’apprentissage du berbère participe chez l’apprenant de développer ses facultés cognitives (raisonnement, connaissance, communication…) mais aussi affectives (relation, dialogue intergénérationnel, famille, création…). Cet apprentissage contribue à mettre en accord – en harmonie – nos élèves, notamment les plus jeunes, avec les réalités culturelles, démographiques et sociologiques qui constituent son quotidien, le quotidien de la société française – évitant ainsi de verser dans des identités de substitution largement importées.

Apprendre en chantant - Une expérience unique

Cette chorale, issue du cours de tamazight pour enfants prodigué par Nacima Abbane à l’ACB, est comme un lointain écho, un clin d’œil et un coup de chapeau : en 1985, Idir enregistrait un disque pour enfants, avec de jeunes pousses du premier âge de l’ACB – Taghribt iw – réunissant des comptines kabyles et françaises. Plusieurs mois durant, il dirigea la chorale, enregistra plusieurs titres, se mit au service de ces enfants pas peu fiers de cette expérience unique.
« J’ai l’impression que c’est l’un des artistes qui a consacré le plus d’attention aux enfants » dit Khirreddine Kati, alias Didine, qui assura en 2020 la direction artistique de cette nouvelle expérience. 
Une nouvelle génération d’enfants donc, filles et garçons mêlés, se frottent à cet exercice. Ils sont une vingtaine qui apprennent à chanter, à interpréter, et plus encore. Par quoi ont-ils commencé ? Bien sûr par une chanson d’Idir, en l’occurrence par « Ssendu », comme un hommage au lointain passé et à l’artiste disparu.

Pour Nacima Abbane, entre exigence pédagogique et engagement associatif, une chorale est un « pilier culturel » : « universels et communs à toutes les cultures, le chant et la poésie représentent deux dimensions fondamentales de la culture berbère. Ils favorisent à la fois la transmission culturelle et linguistique ainsi que l’épanouissement individuel et l’expression de soi ». 
D’autant plus que cette nouvelle expérience est un projet global qui voit les familles, les parents – à commencer par Lila et Nadia, Taoues, Sabrina, Fahima, Sarah, Hassina, Saïd, Hakim, Karim, Abdelkader, Yuliwass, Nouredine, Madjid… – s’impliquer chaque semaine. Lila et Sabrina sont elles-mêmes deux anciennes élèves de l’ACB ! Elles y ont suivi les cours de kabyle pour préparer… l’épreuve facultative de tamazight au bac ! Aujourd’hui, elles s’y retrouvent, avec leurs enfants, perpétuant une histoire et le passage de témoin. Et oui ! par-delà ses fragilités et imperfections, l’ACB figure une longue chaîne, une parenté, intergénérationnelle et humaine, et ce dans le respect de chaque sensibilité, de chaque individualité.

Projet global aussi parce qu’à travers une chorale il est aussi question de créativité (d’écoute de soi et de l’autre), d’émotions et de sensibilité, de transmissions (culturelle et intergénérationnelle), d’un travail collectif qui peut aller bien au-delà des répétitions et des premiers enregistrements vidéo programmés et, bien sûr, d’une pratique artistique, de l’apprentissage d’un savoir, de rencontres avec des musiciens et autres chanteurs et pourquoi pas, demain, de l’expérience de la scène. Mieux : nombre de ces jeunes choristes sont aussi des musiciens en herbe, souvent élèves en conservatoire, qui au saxo, qui au piano, qui à la guitare. 

Cette initiative éclaire la démarche pédagogique de Nacima Abbane : une pédagogie qui laisse toute sa place à l’agrément et à la participation. Résultat, les élèves ont autant de « plaisir à apprendre leurs tableaux de conjugaison que leurs chansons ! Pas besoin de leur rappeler de « réviser », c’est eux qui font travailler leurs parents !!! ». Il y a « Ssendu » mais il y a aussi Aït Menguellet ou Matoub Lounès. A la fin de chaque séance, Didine interprète une chanson du patrimoine (Slimane Azem, Cherif Kheddam, …) pour, encore et toujours, enseigner, transmettre, faire connaitre ce patrimoine musical et poétique par trop oublié. Transmettre aussi, à travers l’apprentissage de la langue kabyle, des valeurs, une sagesse, un rapport au monde. Ainsi, la chanson « Ali d Ouali » d’Aït Menguellet permet non seulement l’apprentissage des verbes et des conjugaisons mais offre aussi à chaque enfant et adolescent l’opportunité de s’approprier  une « ode » à la démarche scientifique : apprendre, expérimenter, observer, cheminer pour se faire sa propre idée et trouver sa propre vérité, un concentré d’intelligence à travers quelques mots clés » … Un « vaccin contre l’ignorance », « D tisegnit ay d-awin takmamt-nneɣ » ponctue Nacima et ce, sans effets secondaires indésirables, bien au contraire.

Horaires & Tarif

  • Formation de 50 heures environ (langue et chorale)
  • 7 à 9 ans : samedi de 14h à 15h30 (Groupe 1)
  • 9 à 12 ans : samedi de 14h à 15h30 (Groupe 2)
  • Chorale : samedi de 15h30 à 17h00 animée par Nacima Abbane
  • Cotisation 50€/an + Adhésion

Pour aller plus loin :

Voir : Les cahiers de vacances de Nacima Abbane.
Écouter : l’entretien de Nacima Abbane et Florence Mestais pour Mon abécédaire amazigh.
Lire : la tribune « La langue maternelle des immigrés n’est pas l’arabe » cosignée avec Tassadit Yacine et Pierre Vermeren.